Le réflexe nauséeux et dentisterie, mieux comprendre pour mieux agir

Le réflexe nauséeux est un réflexe inné et vital. Il permet en effet de prévenir l’entrée de corps étrangers dans les voies respiratoires supérieures (pharynx, larynx, trachée) et digestives empêchant ainsi les corps étrangers de grande taille de les obstruer.

Ainsi, les éléments étrangers, irritants ou les matériaux toxiques sont éjectés par l’action des muscles oro-pharyngés dont les contractions péristaltiques sont spastiques, non coordonnées et de direction inversée.

Le seuil d’intensité de déclenchement de ce réflexe varie d’un patient à l’autre et peut être à l’origine de situations pathologiques où le moindre stimulus déclenche instantanément nausées et vomissements.

Ce type de réaction, sous leur aspect aussi bien majeur que mineur constitue sans l’ombre d’un doute un obstacle à la réalisation de soins dentaires et ce dans tous les domaines confondus.

Etiologie du réflexe nauséeux :

Le réflexe nauséeux peut être suscité par des stimuli non tactiles tels les stimuli visuels, auditifs, olfactifs. Ainsi, la simple vue du dentiste ou le son émis par une pièce à main peut provoquer chez le patient la sensation de nausée. De même l’odeur de certaines substances dentaire, fumée de cigarette, parfums, etc.… ont été décrites par certains patients comme starter de la sensation de nausée et vomissement. Il est intéressant cependant  de constater que le passage de nourriture ne provoque pas de réflexe nauséeux.

L’étiologie du réflexe nauséeux est multifactorielle ; un grand nombre de causes, tant psychologiques que physiques furent décrites comme éléments déclencheurs. Il est cependant délicat d’établir une limite entre les deux car ces paramètres sont étroitement liés. Parmi celles-ci :

1°) Troubles locaux et systémiques: ( obstruction ou écoulement nasal, catarrhe, sinusite, polypes nasaux, congestion des muqueuses du tractus respiratoire supérieur, sécheresse buccale,…)

2°) Facteurs anatomiques:anomalies anatomiques et sensibilités oropharyngiennes ont été proposés comme facteurs prédisposant au réflexe nauséeux

3°) Facteurs psychologiques:   La composante fonctionnelle d’une affection peut être fortement influencée par une réaction individuelle à des évènements stressants, cela constitue « l’apprentissage » dont les mécanismes sont habituellement décrits sous 2 formes : le condtionnement classique et le conditionnement opérant

Prévention et thérapeutique anti nauséeuse :

Le réflexe nauséeux est un phénomène gênant tant pour le patient que pour le praticien. Pour faciliter les soins dentaires, ce dernier doit être contrecarré. Plusieurs traitements ont été proposés dans la littérature scientifique :

Hypnose

De nombreuses techniques d’hypnose permettant de mettre le patient dans un état modifié de conscience peuvent être utilisées en dentisterie. Dans le cas du réflexe nauséeux, une technique d’hypnose a été décrite où il est demandé au patient d’imaginer un interrupteur imaginaire ou encore un bouton pouvant régler le niveau du réflexe dont il aura le contrôle; ce qui va rassurer le patient et le maintenir calme

En combinant les techniques d’hypnose et les exercices de désensibilisation à la maison, le patient peut améliorer le contrôle qu’il a sur son réflexe nauséeux.

Technique de respiration

Il y a controverse quant au fait que le réflexe nauséeux est une réponse réflexe impliquant l’œsophage mais aussi la trachée lors de la respiration.

Pendant les soins dentaires, on demande au patient d’inspirer lentement et profondément par le nez puis d’expirer rapidement de manière forcée sans interruption entre les 2 phases. Cela va permettre au patient d’être en hyperventilation et de se relaxer.

Acupuncture

L’acupuncture est originaire de la médecine traditionnelle chinoise basée sur l’utilisation de fines aiguilles que l’on insère au niveau cutané.

Cette technique va être appliquée sur un point spécifique “anti-nauséeux” se trouvant au niveau de l’oreille  car le nerf vague est à proximité de ce point et celui-ci intervient dans le processus de déglutition. Le point est également adjacent à une branche du nerf trijumeau. En stimulant ce point anti-nauséeux, il va y avoir une inhibition de l’activité des muscles impliqués dans le réflexe

Traitements pharmacologiques

Sédation par inhalation de protoxyde d’azote ou la sédation consciente

L’utilisation du protoxyde d’azote en tant que sédatif volatil est connue pour avoir des effets anxiolytiques et des effets antalgiques au niveau des douleurs dentaires.

Cela va permettre au patient d’être dans un état de relaxation total et diminuerait donc le réflexe.

Anesthésiques locaux

L’utilisation topique d’anesthésiques locaux a été fortement critiqué par certains  auteurs  mais ceux-ci affirment que leur utilisation réduit fortement le réflexe nauséeux

Anesthésie générale

Cette option doit être utilisée en dernier lieu lorsque les autres traitements ne fonctionnent pas car les risques sont trop importants par rapport au soin à effectuer.

Utilisation de NaCl

En saupoudrant un peu de sel (NaCl) sur le bout de la langue, le réflexe nauséeux  diminue chez 95% des patients

Désensibilisation des “trigger zone”

Pour désensibiliser les “trigger zone”, nous pouvons utiliser les techniques citées précédemment, c’est-à-dire les anesthésiants locaux, la désensibilisation systématique couplée à l’hypnose en donnant un miroir et un embout de la pompe d’aspiration, et l’utilisation d’une prothèse. Le réflexe va donc diminuer petit à petit.

Dans le cas plus précis des prothèses d’entraînement, le patient va s’habituer au port d’une prothèse amovible avant de recevoir la définitive. Celles-ci se présentent en l’absence de dents artificielles et de palais. Elles doivent être portées 4 à 5 heures par jour pendant 1 semaine pour conditionner le patient à garder une prothèse en bouche.

Techniques de distraction

C’est une méthode basique mais efficace dont l’une d’elle est la technique de KROL . Lorsque l’attention du patient est détournée, les nausées pourront être contrôlées.

On demande au patient de lever une jambe à l’horizontal sans support et de la maintenir. Quand le patient commence à fatiguer, on doit fournir un effort de conscience plus important pour garder le pied surélevé.

Lorsque le praticien prend une empreinte par exemple, le patient doit se concentrer sur l’obligation de garder sa jambe levée. Si la fatigue est trop grande, on lui demande de changer de jambe.

Si le réflexe nauséeux se fait sentir, on lui demande de lever le pied et la tête en même temps.

Il existe d’autres méthodes de distraction telles que : la conversation avec le patient, se concentrer sur la respiration (inspirer par le nez et expirer par la bouche), compter rapidement jusqu’à 50 puis lire à haute voix…

Le réflexe nauséeux bien que indispensable à la survie d’un individu peut s’avérer problématique lors de la dispense de soins dentaires et être traumatisant tant pour le patient que pour le praticien. Ses mécanismes sont complexes et son étiologie multifactorielle ; il apparaît qu’il n’y a donc pas de traitement universel en matière de gestion des patients nauséeux.

Une grande variété de stratégies de gestion ont été décrites et celles-ci devraient être sélectionnées, combinées et adaptées à chaque patient, et ce afin de suivre les besoins individuels de chacun. Cela est rendu possible uniquement sur base d’une anamnèse détaillée.

Dans plusieurs situations, une combinaison des différentes techniques de traitement est nécessaire; mais malheureusement dans une faible minorité de cas, une gestion efficace n’est pas toujours possible.

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